BIOGRAPHIE DE PAUL RENOUARD, P.Rd

Dessinateur, artiste peintre, graveur à la pointe sèche et à l’aquatinte, aquafortiste, lithographe, xylographe, Charles Paul Renouard est connu mondialement sous le nom de Paul Renouard.

Né à Cour-Cheverny le 5 novembre 1845, sixième enfant d’un modeste sabotier, Paul Renouard quitte à 14 ans son pays natal pour aller gagner sa vie à Paris. Il devient peintre en bâtiments et à la chance de venir travailler dans les locaux de l’École des Beaux-Arts. Il y montre occasionnellement un talent précoce de dessinateur qu’il possède depuis son enfance, est fort remarqué et en 1868 est admis à l’École des Beaux-Arts où il entre dons l’atelier d’Isidore Pils. Élève très aimé de ce dernier, il l’aide dans l’exécution des décorations intérieures de l’Opéra Garnier et en 1875, Pils étant tombé malade c’est Paul Renouard qui peint les plafonds du grand escalier, d’après les cartons de son maître.

Nous lui devons un certain nombre de tableaux : danseuses, portraits de toutes les grandes figures du siècles dont celui de Waldeck-Rousseau qui par leur facture s’apparentent à l’œuvre de ses contemporains, les impressionnistes (Manet, Sisley, Pissaro, Paul Helleu). Nous pouvons également citer les portraits de : Sarah Bernhardt et Victorien SardouAmbroise Thomas,Alexandre Dumas filsÉmile BergeratRavacholMichel-Eugène ChevreulLouis MénardJoseph MeissonnierCamille Saint-Saëns, le Général Boulanger, et toute la série des membres de l’Institut et de la Chambre des Députés, puis Lawrence Alma-Tadema, Sir John Everett Millais, la maréchale Kate Booth, Sir Frederic LeightonLuke Fildes, les neuf croquis d’Henry Irving dans le rôle de Mephistopheles.

Mais là n’était pas sa vocation véritable : il fut avant tout un dessinateur travaillant en « Noir et Blanc ». Son coup d’œil, son intelligence d’observation et son talent sont si exceptionnels, si indiscutables que l’on s’étonne de ne pas lui voir dons son pays une notoriété que l’étranger lui accorde volontiers. De son vivant, il y avait peu de talent qui soit aussi connu, aussi apprécié que le sien, dans le vieux monde et dans le nouveau. Par la variété des sujets qu’il traitait, au gré de l’actualité, on pouvait dire universelle, par la façon intense qu’il avait de ressentir les choses et de les fixer, par le souci d’exactitude qui lui était propre et dont témoignent ses croquis les plus sommaires, ses plus rapides notations, il s’était conquis un public innombrable, cet innombrable public des grands journaux illustrés, sur qui l’image, la représentation graphique de la vie contemporaine, exerçait tant d’attrait.

Collaborateur attitré de L’Illustration, du Paris Illustré, de la Revue Illustrée, du The Graphic, il est célèbre par ses séries sur la vie anglaise qu’il a pénétrée peut être plus intimement qu’aucun indigène, sur l’Opéra Garnier et sur les événements les plus importants qui ont intéressé et passionné notre pays et l’Europe entière : Exposition universelle de 1900affaire Dreyfus, procès « J’accuse…! » de Zola, affaires Thérèse HumbertSteinheil, fêtes du Couronnement de Edouard VII du Royaume-Uni, obsèques de Victoria du Royaume-Uni, fête du 75e anniversaire de l’Indépendance de la Belgique et Exposition universelle de 1905 de Liège, fêtes Franco-Russe à Compiègne en 1901, Première Guerre mondiale 1914-1918.

À Londres, où il a vécu presque autant qu’à Paris et qu’ailleurs, c’est le Parlement, Drury-Lane, la Salvation Army, les Prisons, le quartier des docks, les fumeries d’opium de l’East-End, le Lyceum Theatre, les Cours de Justice, les casernes de horse-guards, le monde des sports, les music-halls, la Royal Academy qu’il explore et qui lui inspire des séries et des séries de dessins, dont les lecteurs du Graphic apprécient les qualités de justesse et d’exactitude, la vision souple fine, l’acuité puissante. L’amusante série que celle de ses « Croquis de poche à Londres », et avec quel sens de l’humour, comme en marge de ses grandes pages, il y fait vivre les types de la vie journalière anglaise, clubmen enfouis dans les vastes fauteuils de cuir, arrosant leur digestion d’innombrables « wisky and soda », visiteurs dans les musées, policeman de la National Gallery qui vous documente sur les maîtres du Quattrocent et sur Turner, le policeman de gare qui prend pour vous les tickets, enregistre vos bagages, vous porte votre valise, les copistes de la National Gallery, les promeneurs de Hyde-Park, les dormeurs des jardins de Kensington, les cochers, les conducteurs d’omnibus, le petit monde des écoles de l’Est, la classe des bébés…Il assiste au Jubilé de la Reine, à des Distributions de prix par le doyen de l’Abbaye de Westminster, au Remontage de l’horloge de la Tour du Parlement, aux Royal Tournaments, aux Classes de danse de Mrs Katie Lanner, aux séances du Cercle anarchiste de Berners street. Puis, c’est l’Irlande, une suite de pages douloureuses et poignantes, d’un pittoresque sombre, d’une vérité émue, qui demeurent inoubliables : Enfants portant la tourbe pour payer l’école, Le Meeting, Une Eviction, Après l’Eviction, Observant les approches de la police…

Le voila à Rome pendant la semaine sainte, à Washington pendant le Congrès, et c’est la vie politique d’outre-mer, saisie sur le vif dans une collection de portraits et de scènes aussi expressifs que spirituels : le Comité des Appropriations, le Comité des Voies et Moyens, la Gauche, la droite, les Représentants de la Presse au Parlement, le Sténographe, les portraits de M. Carlisle, président de la Chambre des députés, de M. Ingalls, président du Sénat…

« Plus qu’un peintre de la vie moderne, il en est le journaliste supérieurement informé, le reporter intelligent et clairvoyant, qui d’un regard vif et rapide auquel rien ne semble devoir échapper perçoit immédiatement ce qui doit être vu et retenu de pittoresque et de tragique ; car ce chroniqueur savait à l’occasion s’élever jusqu’à l’histoire et notait fidèlement d’un crayon ferme, prompt et hardi, avec puissance de vérité qui localise sûrement la scène et le milieu, silhouettait énergiquement les personnages, accusant avec décision et précision les caractères et les types dans les individus » Léonce Bénédite. Rapport général des Beaux-Arts à l’Exposition de 1900, Paris

Paul Renouard est inimitable dans ses études d’animaux. Ses gravures, si originales, consacrées aux volailles, aux chiens, aux chats révèlent ses dons d’observateur caustique du geste et de l’expression. Grâce à une série de feuilles consacrées au Maestro Arturo Vigna en concert à Monte-Carlo, on peut juger de l’exceptionnelle aptitude de Paul Renouard à suggérer le mouvement et à capter l’expression. Selon les propos de Charles Saunier :

« Le Maestro est présenté dans tout le feu de ses fonctions de chef d’orchestre. Bien en chair, ventru à souhait, la tête forte et le crâne saillant, il se courbe, s’élance, s’amincit, se ratatine, pour s’élancer à nouveau, bandé comme un arc dont la flèche serait la baguette qu’il agite », « tel Kleber à la bataille des pyramides. »

« Mouvements, Gestes, Expressions » titre d’un rarissime recueil des œuvres de Paul Renouard, tiré à une vingtaine d’exemplaires. Ces trois mots sont, en effet, tout RENOUARD. Une éducation première d’une extrême solidité a permis à son oeil d’analyser les plus singuliers mouvements les plus caractéristiques gestes, les plus fugitives expressions et sa main peut instantanément consigner le phénomène observé.

Paul Renouard a marqué son époque et touché ses contemporains tel Vincent van Gogh qui à travers ses correspondances avec son frère Théo à toujours témoigné d’une grande admiration pour le travail et le talent de Paul Renouard. On trouve ses œuvres en particulier : au Musée du Louvre et ou Musée d’art moderne de la ville de Paris (séries sur la vie anglaise). Au Musée national de l’art occidental de Tokyo, à la Bibliothèque royale de Belgique, ou à la Bibliothèque-musée de l’Opéra (séries sur la danse et l’Opéra), aux Musée des beaux-arts de Tours, de Limoges, de Blois (œuvres diverses très nombreuses). Hayashi Tadamasa fut un des mécènes de Paul Renouard, et sa collection de près de 200 gravures et dessins fit, à la mort de Hayashi Tadamasa, l’objet d’une donation par ses héritiers au Musée de la Maison Impériale de Tokyo (l’actuel Musée national de Tokyo ).

Secrétaire de la Société nationale des beaux-arts et de la Société des artistes français, il obtint la Médaille d’Or aux Expositions Universelles de 1889 et de 1900. Il est Chevalier de la Légion d’Honneur en 1893. Professeur à l’École nationale supérieure des arts décoratifs en 1902. Une grande rétrospective lui est consacrée au Musée National du Luxembourg en 1904. 1920, il est fait officier de la légion d’honneur. Le musée des Beaux Arts de Blois inaugure en 1922 les Salles « Renouard ». Paul Renouard a été marié à Mlle Émilie Larsonneur. Il meurt à Paris le 2 janvier 1924 et repose en notre « Pays de Loire », dans le petit cimetière de Chambon-sur-Cisse.

Statue de Paul Renouard
Statue de Paul Renouard (Blois, France)

Parmi ses élèves, nous signalerons notamment : Le peintre, graveur et écrivain auvergnat Maurice Busset (1881-1936) ; André Galland (1886-1965) ; La vichyssoise Jeanne ; Madeleine Favier ; Albert Chartier ; LegueultBrianchon et Desnoyer

Anecdote : Quand il était à Londres en 1873, Vincent Van Gogh allait toutes les semaines regarder les vitrines du « Graphic« . Il acheta plus tard à la Haye 21 tomes de ce journal. Il découpa les gravures sur bois et les colla sur un papier fort pour se constituer « son musée personnel ». Il n’était pas le seul admirateur de Renouard, Huysmans, Vollard, le collectionneur CamondoHayashi Tadamasa et même Jean-Léon Gérôme qui ne se génait pas pour le comparer à son homonyme, bien sur en défaveur d’Auguste qui ne trouvait pas grâce à ses yeux.

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