Le sort des artistes est bien souvent lié à la loi de l’alternance : gloire, puis oubli plus ou moins prolongé ; mise à l’écart puis célébrité. Peu d’entre eux y échappent.
Paul Renouard semble se situer dans la première catégorie. Il a joui, de son temps, c’est-à-dire vers le dernier quart du XIXe siècle, d’une grande renommée; on sut reconnaître son talent -qui était grand- et apprécier à sa juste valeur son art de dessinateur et de chroniqueur. Le Cabinet des Dessins du Louvre conserve du reste un fonds important de dessins de cet artiste, et nous avons jugé opportun de demander à l’une de nos étudiantes de l’Ecole du Louvre, d’en établir, pour son mémoire, le catalogue. C’est dire l’intérêt que nous portons à ce maître auquel viennent consacrées plusieurs expositions. Paul Renouard apparaît, en effet, avec Steinlen, comme l’un des dessinateurs les plus féconds, et les plus dignes d’éveiller notre curiosité, que ce soit dans la traduction et l’évocation des événements historiques importants, ou simplement les menus faits quotidiens de son temps. C’est pourquoi son art relève aussi de celui du chroniqueur : ce fut le cas, peu auparavant, et dans un tout autre domaine, de Constantin Guys.
Qu’il utilise la plume ou le cryon, c’est au moyen de traits rapides, incisifs et vivants que Renouard relate effectivement toute une partie de la vie contemporaine. L’histoire, comme le fait divers ou l’annecdote, le portrait comme la silhouette, les scènes de moeurs comme la vie journalière, tout l’intéresse, tout est prétexte à des croquis pleins de vivacité, où à des dessins plus scrupuleusement élaborés. C’est pourquoi ses dessins restent pour nous un répertoire étonnant d’un mode variè. Il a été vérité, il restera libre dans sa technique, faisant preuve d’un esprit observateur et souvent piquant qui ne peut laisser indifférent. Est’il réalistye ? Pas vraiment car il ne s »enferme pas dans une doctrine. Dans un genre bien différent de celui de Toulouse-Lautrec, il veut lui aussi faire vrai et non idéal. Il n’est pas non plus satiriste, et encore moins un caricaturiste. Il observe la vie qui l’entoure et dessine tout. « Tout est sujet » écrivait Delacroix. Pour Paul Renouard tout est sujet mais en fonction de l’homme. Humaniste ? Pas vraiment. Mais Paul Renouard dessine l’humanité.
Maurice Serullaz
Conservateur en Chef au Musée du Louvre
Cette préface a été réalisé dans le cadre d’un exposition de Paul Renouard au Japon
Session : Du 8 septembre au 20 octobre 1981
Salle : Musée Seiji Togo
Organisée par : Fondation des Beaux-arts de Yasuda Kasai
Sous les auspices de : Ministère des affaires étrangères du Japon, du secrétariat d’État chargé des Affaires culturelles du Japon, de l’Ambassade de France au Japon et de Yasuda Fire & Marine Insurance Co., Ltd.