Le Musée des Arts décoratifs a inauguré cet après-midi une très intéressante exposition, comprenant principalement les principales productions de Paul Renouard. Cette, exposition comporte à elle seule plus de deux cents pièces se rapportant aux événements principaux de ces dernières années.
Les très nombreux visiteurs, artistes et amateurs, qui ont assisté à cette inauguration ont pu se rendre compte de l’importance de l’œuvre de ce maître incontesté du crayon, tant pair la diversité des sujets que par la maîtrise d’exécution, Un très beau portrait de M. Henri Rochefort attire l’attention dès l’entrée. A signaler également un portrait de Paul Déroulède, datant du procès de la Haute-Cour.
Une quinzaine de planches ayant trait au théâtre d’enfants de Londres peuvent compter parmi les plus belles pages de cet artiste. Le procès Steinheil est représenté par une dizaine de dessins dont les principaux ont paru dans l’Illustration. Le procès Dreyfus a inspiré à ce maître du croquis plusieurs dessins très remarquables parmi lesquels celui qui représente la sortie de Dreyfus de la salle du Conseil de guerre de Rennes est particulièrement remarquable. L’accusé s’engage entre la haie de soldats dos tourné.
Notons aussi un portrait d’Esterhazy portant sur l’une des marges la curieuse lettre autographe suivante : Monsieur, si l’offre que vous m’avez faite ce matin, émanait de votre Journal Le Graphic et non pas de vous seul, je pourrais l’accepter, mais à la condition que ce soit une affaire; je n’ai aucune raison de faire a un journal anglais, étant donné la haine anglaise actuelle pour tout ce qui est français; une gracieuseté gratuite. Vous n’avez, en en ce cas, qu’à me fixer un rendez-vous. Compliments distingués.
Une série de portraits de Deschanel alors qu’il était président de la Chambre, est également très remarquée. L’un de ceux-ci intitulé : M. Deschanel rappelant M. Coûtant à l’ordre, provoque quelques sourires. Signalons pour terminer, une série très importante de dessins et de peintures sur le Ballet idéal. Quatre grandes toiles, destinées à être reproduites en tapisserie, sont seulement terminées. Seize petites toiles, ébauchées d’un pinceau franc et hardi, sont la base de cette œuvre, qui représente par la quantité des esquisses et études qui les accompagnent, un labeur considérable. Telle est, dans ses grandes lignes, la composition de cette exposition remarquable à tous les points de vue. Nous ne doutons pas qu’elle remporte auprès du public le plus franc succès.
La Presse – 8 novembre 1910