Bonifié par les ans, qui arrondit les crêtes
Le temps s’est allanguit, sous un regard rieur,
Jusqu’à quantre vingt dix, un printemps qui se fête!
Ayant chassé l’intrus, ayant mâté son coeur
Par deux fois bien secoué, le corps a rebondi
Grâce à de petits soins, donnés au quotidien
Par la muse fidèle qui garde chaud le nid.
L’artiste ranimé, en stimulant les siens
Invente l’avenir, dans l’air parisien.
Le soleil son ami lui inspire d’être en vie.
Là-haut sur sa terrasse, son âme se souvient:
Doré comme un pruneau, sur le rivage blanc
Il s’approche du mât et hisse le poisson,
Souvenir de voyage aux confins de l’Orient,
Et signe d’allégresse sur le rivage breton.
Quand la marée voudra demain il partira
A la barre du Dremwell pêcher le poisson gras
Relever le casier, où gigote un homard.
La fumée sur la grève lui dit qu’il est bien tard
Car à « l’avent du bri », sur le muret de pierre
L’attend son tablier pour le faire cuisinier
D’un festin familial, ô cadeau de la mer!
La tête toute en couleurs, dans son grand atelier
Il peut aller rêver ou bien y bricoler.
Un pinceau à la main reviennent les paysages
Du ciel survolés, de la terre imprégnés,
S’épandent sur la toile en mouvements singuliers.
L’automne s’y prépare, visiteurs de passage,
Vous connaîtrez le fruit de ces conciliabules
Dans les salons mondains, galeries et musées.
Car il aime briller quand il sort de sa bulle.
Et la postérité, il va en être fier,
Comme il l’est en secret de l’oeuvre du grand-père*
* Paul Renouard (1845-1924)
Poème de M.A.R
pour les 90 ans de François Baron-Renouard